Ce matin, le ministre Dermagne a prononcé ce qui s’apparente à un gros mot dans le secteur bancaire : un projet de loi.
Cela fait maintenant des mois, ou plutôt des années, que le gouvernement négocie avec le secteur bancaire pour trouver une solution à la suppression des distributeurs automatiques de billets. À ce stade, tout le monde connait déjà l’histoire.
Les quatre grandes banques du pays ont créé la société Batopin qui gère les machines des institutions pour diminuer les coûts. Au passage, la société va enlever les 5000 distributeurs qui se trouvaient en agence pour installer 2 000 distributeurs dans les gares et centres commerciaux. Promis, disent les banques, ce n’est pas pour diminuer les coûts, c’est pour mieux servir les client·e·s.
La grande qualité de ce dossier est la constance. Le secteur bancaire raconte toujours les mêmes salades (bla bla bla plus personne n’utilise le cash, bla bla bla ça nous coûte trop cher, bla bla bla votre histoire de fracture numérique et de cours légal des billets) et, en face, personne n’y croit. Motions de collèges communaux, résolutions au parlement, questions à la Chambre, opposition des organisations de la société civile et même enquête de l’Autorité belge de la concurrence. Rares sont les initiatives qui peuvent se vanter d’être aussi discutées. Rares sont les projets qui touchent autant les gens, riches ou pauvres, et dépasser les couleurs politiques.
Pourtant, cela fait plusieurs fois que le cabinet du ministre Dermagne nous fait le coup. Qu’on nous annonce que ces négociations sont les dernières et que si le secteur bancaire ne coopère pas (spoiler : il ne le fait pas et, au contraire, se permet même de venir avec des listes d’exigence), le gouvernement sortira avec un projet de loi. Cette fois-ci, le ministre s’est osé à l’exercice de la presse avec une interview accordée à la Première ce matin. L’équivalent, surement, d’une personne qui annonce à tout son entourage qu’elle va se remettre au sport le mois prochain histoire d’être tenue responsable si elle ne le fait pas. Le secteur bancaire va voir ce qu’il va voir ! Le gouvernement veut des distributeurs à moins de 5km en zone rurale et 2km en ville. Il a oublié de parler de la densité de population et de l’accessibilité de ces machines pour établir une répartition juste.
Espérons cependant que cette menace soit la dernière en son genre. Parce qu’à force de menacer de sévir et de ne pas le faire, pendant ce temps-là, les quatre grandes banques du pays ne se sont pas gênées pour retirer les distributeurs des agences et installer leurs « points cash » à des endroits souvent improbables.
Financité