Le 7 décembre 2020, l’eau entrait en bourse et suivait le chemin financier tracé par le pétrole et le blé avant elle.
Un an déjà que les boursicoteur·euse·s du monde entier peuvent spéculer sur le prix futur de l’eau. C’est important, car la ressource est rare. Et comme le dit un proverbe boursier célèbre, tout ce qui est rare vaut de l’argent, surtout s’il s’agit de la survie de l’espèce humaine.
Le 7 décembre 2020, c’est la Bourse de Chicago et le Nasdaq qui ont effectué les premières transactions de contrats à terme liés au marché de l’eau en Californie. C’était une aubaine ou plutôt une suite logique, puisque le cadre juridique californien permet depuis plusieurs années déjà de détenir des titres de permis d’utilisation de l’eau. L’eau y est donc, en quelque sorte, un produit commercial comme un autre. Ce fonctionnement a déjà causé une augmentation drastique du prix de l’eau et de nombreuses sécheresses dans les exploitations agricoles. Un élément de plus pour pousser l’entrée en bourse de l’or bleu puisque qu’on ne pourrait pas accuser les marchés financiers de causer des sécheresses à cause de la spéculation. Elle existait déjà !
Après tout, le même mécanisme de contrat à terme, c’est-à-dire la possibilité d’acheter à un prix fixé aujourd’hui une livraison dans le futur, existe déjà pour des produits comme le blé et le pétrole et, mis à part quelques famines et flambées du prix du pétrole ou autre réchauffement climatique, il a permis à des investisseur·euse·s du monde entier de faire fortune.
Les opposant·e·s à ce projet se contentent de préciser que, soumettre l’eau à la spéculation financière, alors que 2,2 milliards de personnes n’ont toujours pas accès à l’eau potable, que 3 milliards de personnes ne disposent pas d’installations de base pour se laver les mains avec de l’eau et du savon, et que deux millions de décès y sont liés chaque année, ouvre des scénarios encore pires. « L’eau est la mère de tous les droits, mais sa cotation en bourse rendra en fait inutile la résolution fondamentale de l’Assemblée générale des Nations unies de 2010 sur le droit universel à l’eau », ajoute Rise for Climate Belgium dans la description de son événement appelant à libérer l’eau.
Comme dirait un autre proverbe boursier, si on peut acheter un produit dérivé en misant sur la hausse du prix de l’eau, pourquoi pas. Il suffit d’être du bon côté de ce scénario gagnant·e-perdant·e. Gagne celui ou celle qui gagne son pari financier. Perd celui ou celle qui n’a pas accès à l’eau, celui ou celle qui ne peut plus opérer son exploitation agricole, ceux·celles pour qui les denrées seront devenues trop chères, et la planète.
(Financité)