Le modèle européen d’agriculture intensive et le recours massif à l’utilisation de pesticides de synthèse constituent une menace avérée pour la biodiversité et la survie des êtres vivants. La disparition des abeilles en est un des symptômes les plus alarmants : cette espèce par ailleurs essentielle au fonctionnement des écosystèmes disparaît à mesure que s’industrialisent les techniques agricoles, ce qui menace l’ensemble de notre système alimentaire.
S’ajoute à ce constat la disparition rapide de l’agriculture familiale au profit d’exploitations industrielles, faisant passer la qualité nutritionnelle des produits derrière les impératifs de rendement économique. Pour sauvegarder notre patrimoine biologique et humain et permettre un retour de la biodiversité dans les zones agricoles, il est urgent de se mobiliser. Dans cette perspective, une vaste coalition d’organisations de la société civile, parmi lesquelles les Amis de la Terre-Belgique, a lancé l’Initiative Citoyenne Européenne « Sauvons les abeilles et les agriculteurs ».
Une agence scientifique des Nations Unies vient de rendre public un rapport qui suggère que l’appauvrissement du vivant, qu’il s’agisse des animaux, de la flore, des insectes et de la faune aquatique, est directement lié à l’émergence d’une « ère des pandémies ». Cet avertissement argumenté a été publié par « La plate forme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité » (IPBES). Un organisme qui a été créé en avril 2012. D’après cet outil onusien qui veut fonctionner et lancer des alertes comme le GIEC le fait pour le climat, les pandémies pourraient être de plus en plus fréquentes et de plus en plus difficiles à éradiquer si l’être humain accentue sa pression insupportable sur les écosystèmes et la biodiversité.
Une opinion de Gil Bartholeyns, historien à l’université de Lille et romancier (Deux kilos deux est paru aux Éditions JC Lattès en 2019). Il codirige la revue Techniques&Culture. Gil Bartholeyns sera l’invité de Pascal Claude dans « Dans quel monde on vit » sur La Première, ce samedi, à 10h.
« Il est un lieu, le très paisible séjour d’un éternel printemps… » Jacques van de Walle, Heroica, 1656 (Naturae Domus, la maison de Nature)
La « covidisation » du monde n’est que la conséquence des violences faites à toutes les formes de vie. Cobra, civette masquée, paon bleu, fourmilier écailleux, renard volant… On se croirait dans un bestiaire fantastique. Mais il s’agit de la ménagerie des marchés humides que certains ont qualifié de « contre nature ». Nous connaissons mieux les fermes de cent mille poulets ou de mille cochons, mais les uns comme les autre sont des regroupements chimériques de haute dangerosité. Espèces, nombre, géographie : tout est sens dessus dessous. Nous n’avons jamais été aussi terriens, rendus à notre « première nature ».
Qu’il vienne d’une chauve-souris ou qu’il ait transité par un pangolin, le coronavirus qui a mis le monde sens dessus dessous et dont le bilan mondial approche les 100.000 morts vient du monde animal, c’est certain. Mais c’est l’activité humaine qui a favorisé son passage à l’Homme, et si rien ne change, bien d’autres vont suivre, alertent des spécialistes.
Qu’il vienne d’une chauve-souris ou qu’il ait transité par un pangolin, le coronavirus qui a mis le monde sens dessus dessous et dont le bilan mondial approche les 100.000 morts vient du monde animal, c’est certain. Mais c’est l’activité humaine qui a favorisé son passage à l’Homme, et si rien ne change, bien d’autres vont suivre, alertent des spécialistes.
« Tout le monde peut avoir un impact chaque jour, si vous pensez aux conséquences des petits choix que vous faites: ce que vous mangez; d’où ça vient; est-ce que ça a causé de la cruauté envers les animaux; est-ce que ça provient d’une agriculture intensive, ce qui est le cas en général; est-ce que c’est bon marché grâce à du travail forcé d’enfants; est-ce que sa production a nuit à l’environnement; combien de kilomètres a-t-il fallu le faire voyager; avez vous pensé à marcher au lieu de prendre la voiture; comment pourriez vous lutter contre la pauvreté, parce que les gens pauvres ne peuvent pas faire ce genre de choix éthiques, ils doivent faire ce qu’ils peuvent pour survivre, ils ne peuvent pas se poser ces questions sur ce qu’ils achètent, ça doit être le moins cher et ils abattront le dernier arbre parce qu’ils sont au désespoir de trouver de la terre pour faire pousser quelque chose à manger… Ce que nous pouvons faire chacun dans notre vie dépend de qui nous sommes, mais nous pouvons tous faire une différence, tous. »
(Jane Goodall)
Échec dans la lutte contre le réchauffement climatique, dégradation des écosystèmes, incapacité à résorber la pauvreté, creusement des inégalités, sous-financement des soins de santé et de l’enseignement, insuffisance de personnel dans les secteurs liés à l’aide à la personne, pression sur les travailleurs, toute puissance de l’industrie agroalimentaire, impossibilité pour nombre de personnes de se loger décemment à un prix acceptable, coupes dans les budgets alloués à la culture et aux services publics, incapacité à remettre en cause le remboursement de la dette, mainmise des forces du marché sur les pouvoirs élus : tous ces problèmes auxquels font face nos sociétés (et la liste n’est pas exhaustive), ont une cause commune : l’emprise de l’économie sur la société. Mise en évidence par Karl Polanyi dans son œuvre majeure [1], cette caractéristique est ce qui singularise le capitalisme au moins autant que l’accumulation de profit sans limites et la concurrence. Or, et comme il l’avait déjà dénoncé, cette marchandisation de tout ce qui peut l’être ne peut conduire qu’à des catastrophes. Catastrophe dont, en son temps, la montée des fascismes et la seconde guerre mondiale furent parmi les plus terribles exemples. Les mises en garde de Polanyi sont d’une criante actualité et il est clair que le XXIe siècle ne saura échapper à des vagues de barbarie si l’économie n’est pas remise à sa place, à savoir réencastrée au service de la société, et non l’inverse.
L’augmentation croissante des exportations agricoles du Brésil suscite des craintes d’une nouvelle avancée de la frontière agricole brésilienne, au détriment de la forêt amazonienne, « poumon de la planète », et d’autres écosystèmes menacés.
L’alarmant rapport de l’Ipbes sur la biodiversité a reçu un important retentissement, mais que contient-il exactement ? Extraits choisis parmi les 1 500 pages d’un acte d’accusation implacable.
Forêts, déserts, paysages et écosystèmes vitaux de la Terre risquent de subir une « transformation majeure » au cours du prochain siècle du fait du changement climatique, ont prévenu jeudi des scientifiques.